Test – Bioshock Infinite

L’éternel recommencement est un raisonnement fondamental, qui peut facilement se transposer dans l’industrie du jeu vidéo. Pourtant de temps à autre, quelques productions arrivent encore à nous émerveiller, en amenant ce média qui nous est cher, vers un autre niveau. Ce fut le cas de l’excellentissime Bioshock, qui a réussi à nous plonger dans les méandres d’une ville utopique : Rapture. Mais après les thèmes de l’eau et des profondeurs, c’est à celui des airs qu’Irrational Games tente de s’attaquer.

Bioshock Infinite

Ressemblance frappante

Avoir la tête dans les nuages, une expression qui prend tout son sens lorsqu’on pose le pied dans Columbia pour la première fois. Une ville fantasmagorique et rempli de mille et une promesses, cachant la vision étriquée d’un homme qui se fait connaitre comme étant son prophète. Les similitudes avec une certaine citée engloutie sont tout de suite reconnaissable, mais loin de parler d’un manque d’inspiration, on pourrait plutôt voir cela comme un clin d’œil. Bioshock Infinite arrive à reprendre tout ce qui avait fait le succès du premier opus de la série, tout en s’y référant de manière astucieuse et presque naturel. Des détails parfois anodins, mais que l’œil observateur pourra dénicher assez facilement, et qui ne manqueront pas de nous réfléchir. Un raisonnement qui s’entreprend dès la scène d’introduction, avec un départ qui s’effectue à partir d’un phare…

Bien que très ressemblante, ces deux utopies se distinguent sur pas mal de points. Là où Rapture pouvait être présentée comme un lieu de la décadence, Columbia se caractérise par son contraire, avec une société hiérarchisée et contrôlée par une forte présence de la religion. Une démesure presque parfaite, avec des habitants modèles qu’on peut admirer dans leur routine quotidienne. Mais derrière cette façade propre et lisse, se cache des travers qui auront vite fait d’émerger à nos yeux. Le capitalisme américain, la politique ou le rejet des ethnies, autant de sujets qui seront abordés et qui se dévoileront petit à petit à nous. Du moins à ceux qui auront envie de s’y attarder, en scrutant les alentours ou en espionnant les conversations des passants.

La qualité d’écriture auquel nous avait habitué la série, se retrouve encore une fois dans Bioshock Infinite. Comment rester insensible devant une narration qui arrive presque à éclipser l’implication du joueur, laissant la place à une profusion de références, tout en ayant une grande part de fantastique. On aurait presque envie que Bioshock Infinite ne soit pas un jeu vidéo, mais une histoire qu’on aurait le goût de nous raconter au coin du feu. Un sentiment qui ne fait que se renforcer lorsqu’on découvre, après quelques heures de jeu, tout ce que représente la présence du personnage d’Elizabeth. Bien plus qu’une simple demoiselle qu’on doit être amené à sauver, celle-ci constitue un véritable pilier du jeu, que cela soit en termes de gameplay ou de narration.

Bioshock Infinite Xbox 360 PS3 PC Bioshock Infinite Xbox 360 PS3 PC

Une touche féminine

L’histoire de Bioshock Infinite se fait sur une ligne conductrice qui est plus ou moins linéaire et dont-il est difficile de se détacher. Un mal pour un bien, car même lorsqu’on ne se retrouve pas au milieu d’un dialogue entre les personnages principaux, l’avancé du scénario se fait au travers d’Elizabeth, qui nous accompagne durant une bonne partie des dix heures dont va être constitué l’aventure. La jeune femme n’hésite pas à flâner dans les rues ou maisons de Columbia, laissant place à une curiosité qui renforcera notre sympathie pour elle. Au point qu’elle prendra vite une place centrale, notamment lorsqu’on en apprendra un peu plus sur son passé et son rôle dans l’intrigue. Son caractère, mais aussi ses sentiments, sont mis en évidence par un remarquable travail effectué sur les animations du personnage. Un comportement qui évoluera au gré du scénario, selon les rebondissements ou les situations qu’on va rencontrer. Allant jusqu’à regretter son absence lorsqu’elle s’éloigne un peu trop de nous.

Mais loin de jouer seulement avec notre âme sensible, Elizabeth aura également un rôle beaucoup plus utilitaire. Car bien plus qu’une simple figurante, elle prendra part au combat, en aidant son compagnon de fortune avec toute l’aide qu’elle pourra trouver. Des munitions en cas de pénurie, voir une trousse de soin lorsqu’on aura eu le malheur de se prendre un méchant coup. Autant d’occasions d’aimer un peu plus sa présence, surtout qu’il est inutile de la protéger, car elle sait très bien prendre soin d’elle-même. Rapidement viendra s’installer une nouvelle mécanique, avec la capacité d’Elizabeth de créer des portails. Une habileté qui aura ses conséquences scénaristiques, mais qui trouvera surtout son utilité durant les affrontements, avec la possibilité de créer des nouvelles interactions dans les niveaux.

Concrètement, il sera possible de demander à la jeune fille de faire apparaitre sur le terrain toute sorte de chose. De l’armement, des tourelles automatiques ou des automates qui viendront nous prêter mains forte. Une aide précieuse qui prend surtout son sens dans les hauts niveaux de difficulté du jeu. Car s’il y aurait un reproche à faire à Bioshock Infinite, c’est vraiment sa relative facilité. Pour rencontrer un peu de résistance face à nos ennemis, il vous sera fortement conseillé de démarrer l’aventure en mode difficile, notamment si vous êtes habitué au genre. Heureusement la fin du jeu (ou par le biais d’un code) vous permettra de débloquer le mode 1999, même si cela ne bouleversera pas grandement les choses. Au mieux cela rendra les ennemis plus résistants, mais les morts seront toujours aussi peu pénalisantes, vous faisant à peine perdre quelques pièces de monnaie.

Bioshock Infinite Xbox 360 PS3 PC Bioshock Infinite Xbox 360 PS3 PC

Pan Pan Boum

Du coté de l’action il faut en contrepartie se résoudre à quelque chose de bien plus classique. L’armement que Booker Dewitt pourra traîner avec lui, limité à deux emplacements, est beaucoup plus limité et se restreint à du déjà-vu. On y revoit les sempiternels pistolets, mitrailleuses, carabines et autre fusils à pompe. Un manque de folie et de diversité qui fait un peu peine à voir, mais dont-on s’accommode assez vite et qu’on finit par oublier devant le dynamisme de l’action. Car si la série nous avait habituée à quelques énigmes disséminées par-ci par là, c’est une tendance qui n’a pas du tout été reprise avec Bioshock Infinite. Les seules embuches que vous allez rencontrer sont d’ordre scénaristique, voir avec des portes fermées à double tours, qu’Elisabeth pourra vous ouvrir grâce à ses talents de crochetage.

Cela est loin d’être déplaisant, car l’action est accentuée par de grands niveaux qui se présentent parfois sur plusieurs étages, dans lesquels il est possible de se déplacer au travers d’un système de rails. Notre héros possède en effet un crochet qui lui permettra de se  mouvoir sur ses chemins de métal, voir de s’agripper à des points d’accrocher pour prendre de la hauteur. Il est donc possible de prendre rapidement ses ennemis par différents angles de vues, en explorant la carte à la recherche d’une nouvelle arme, voir de simplement fuir le combat durant un instant. Des possibilités qui agrémentent l’action, forçant et permettant au joueur de se déplacer à sa guise. Mais loin d’être un simple outil de transport, le crochet est également une arme qui fera de gros ravage au corps à corps. Avec une effusion de sang et des mises à mort qui ferait jalouser n’importe quel tueur en série.

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Comme au bon vieux temps

Bioshock Infinite ne serait pas le digne héritier de sa lignée, si en même temps que les armes, il n’y aurait pas la possibilité d’utiliser un panel de sorts complémentaires. Les plasmides sont ainsi remplacés par les toniques, mais si leur désignation à changer, ce n’est pas le cas de leur utilisation. Le seul rajout à signaler, c’est qu’il est possible de charger la compétence pour créer une mine ou augmenter son effet, voir d’avoir un effet légèrement différent. Concrètement, la boule de feu pourra par exemple être simplement lancée sur l’adversaire ou être déposée sur le sol pour créer une mine explosif. Le control mental, l’électricité, la nué de corbeaux ou encore la vague d’eau, un choix parmi huit toniques qui nous permettront d’utiliser le décor contre nos ennemis (électriser une flaque d’eau, pousser vos ennemis dans le vide,…). Libre à vous aussi de les combiner, pour créer de nouveaux effets dévastateurs. Le procédé reste toujours aussi efficace, mais on note tout de même un gros manque de diversité. Après le passage des deux premiers Bioshock, on aurait aimé rencontrer un peu plus de surprises dans leur utilisation. Surtout que contrairement aux plasmides dans Rapture, les toniques sont loin d’avoir une place scénaristique très importante.

Si contre toute raison, l’envie de flâner dans les rues de Columbia pourrait vous prendre, il faut savoir que l’exploration n’a pas une grande place dans Bioshock Infinite. Les quelques lieux qu’on traverse sont certes assez vaste par moment, regorgeant de petits recoins et portes à ouvrir, mais la progression est plus que linéaire. On passe systématiquement par les endroits que les développeurs voudront bien nous faire visiter. Au mieux il faudra vous concentrer à fouiller autour de vous, avec chaque valises, caisses ou même poubelles qui sera l’opportunité de vous remplir les poches. Mais cela sera surtout la chance de pouvoir mieux appréhender et comprendre tous les enjeux autour de Columbia. Les protagonistes ont laissé un grand nombre d’indices visuels et des enregistrements audio, qui vous permettront de mieux comprendre l’intrigue principale.

Sur bien des points, Bioshock Infinite est ce qui se rapproche le plus d’un chef d’œuvre, mais en titillant un peu on peut tout de même lui trouver des imperfections. Difficile de lui reprocher sa mise en scène et son scénario à toute épreuve, mais l’absence de choix moraux décisifs et le sentiment d’être sur un rail scénaristique sont très présents. Les surprises ne se font pas vraiment là où on les attendait, notamment sur les phases d’action trop classiques, qui au mieux sont là pour soutenir l’ensemble. Mais ce serait vraiment chercher la petite bête que de mettre ces défauts en évidence, car ils sont vraiment bien loin de ternir l’ensemble du jeu.

 

En conclusion

Comment juger de la qualité d’un jeu qui nous apporte tellement de choses, que cela soit sur le plan émotionnel ou même du divertissement pur et simple. Avec Bioshock Infinite, Irrational Games touche du bout des doigts la perfection, avec une production qui prouve encore une fois que le jeu vidéo peut bouleverser et toucher les joueurs. On en vient presque à oublier qu’on joue dans un FPS, pour finalement se laissé happer par l’histoire et son univers, ainsi que du formidable personnage d’Elizabeth. Une expérience qui jusqu’au bout nous tient en haleine, qui mérite d’être vécu, rien que pour subir l’émerveillement de sa fin qui ne manquera pas de vous retourner le cerveau.

 

Par Cédric Fischer

Rédacteur en chef

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