Il est communément admis que les japonais sont friands de jeux qui sortent un peu de l’ordinaire, en témoigne l’impressionnante flopée de titres qui ne sortiront jamais de l’archipel, car leur principe ne convient pas forcément à nous autres occidentaux. Pourtant, après l’énorme succès du jeu, cela n’a pas empêché à Nintendo de tenter le pari de sortir Tomodachi Life dans nos contrées. Un mixte d’Animal Crossing, mais dans la vie réelle, tout en ayant une belle barre de folie. C’est un peu près comme ça qu’on pourra résumer ce jeu qui sort vraiment des sentiers battus.
Mii Crossing
On pourrait décrire Tomodachi Life comme un concentré de tous les simulateurs de vie qu’on a pu croiser ces dernières années. L’idée de base étant d’avoir une île, dans laquelle se trouve un bâtiment principal qu’on remplira avec des Miis. Des appartements inoccupés et qui trouveront vite preneur au grès de nos envies. Car le joueur pourra piocher dans ses Mii existants ou alors scanner des QR code glaner aux quatre vents sur la toile. L’intérêt étant de faire cohabiter des personnalités, existantes ou non, avec nos propres avatars familiaux. Ces petits personnages évolueront alors chacun à leur manière, sans qu’on est vraiment besoin de s’occuper directement de leurs besoins. L’important est plutôt de les suivre dans leur quotidien, ainsi que de guider les relations qui pourraient se tisser entre eux. Cela au travers des différentes activités qui se débloquent au fur à mesure de notre progression, comme des lieux touristiques ou des boutiques. Présenté de cette manière, cela peut paraître presque ennuyant comme concept, mais cela serait sans prendre en considération toute la folie qui émane du jeu.
Car ce qu’il faut bien saisir, c’est qu’on n’a finalement pas un véritable impact sur la vie de nos Miis. Dès qu’ils auront pris place dans leur appartement, ils solliciteront notre attention, pour qu’on puisse résoudre certaines de leurs envies ou leurs problèmes. Il s’agira souvent d’acheter un vêtement ou un chapeau pour eux, voire de leur donner un conseil pour devenir amis avec un autre locataire. On est donc très loin d’un jeu de gestion où il faudra prendre en considération les besoins de nos personnages. Même s’il nous demande parfois à manger par exemple, il est impossible pour eux de mourir. Au mieux selon leur satisfaction, ils prendront de l’expérience et donc des niveaux, ce qui débloquera des nouveaux objets de loisir, des nouvelles chansons ou des expressions. Mais même s’il y a quelques boutiques sur l’île et qu’on peut habiller nos Miis, la personnalisation reste très sommaire. Il n’est pas question de meubler les appartements selon nos goûts par exemple. Au mieux on pourra acheter un thème bien précis, qui servira ensuite juste de décor. Le joueur devient donc vite un spectateur, qui ira de fenêtre en fenêtre pour voir comment se déroule la vie de ses Miis.
Mii amor
Les interactions avec les occupants de l’île ne se résument pas seulement à répondre à leurs tracas ponctuels, mais aussi à les suivre dans leurs activités sur l’île. Une petite promenade près de la fontaine, un concours de chant dans la salle de spectacle ou encore les voir faire du sport à la tour d’observation. Quelques évènements seront régulièrement organisés, selon l’heure de la journée ou la saison. En plus de ce coté un peu voyeur, le joueur peut aussi débloquer des minis-jeux un peu plus interactifs, comme avec le studio de photos ou le « Love Testeur ». Mais passé le stade de la découverte, on finit globalement par toujours faire la même chose. On se rend vite à l’évidence que le jeu souffre grandement d’un manque d’interactions. Même les jeux disponibles avec les Miis tournent vite en rond. Surtout que la grande majorité tourne autour du principe de reconnaître des objets, voire de répondre à un questionnaire vrai ou faux en rapport avec les Miis. Les premières heures sont relativement amusantes et on passe un bon moment à découvrir l’humour du jeu, en plus des minis jeux déjantés, mais on tombe bien vite dans la lassitude.
Cette répétitivité est heureusement compensé par le coté social de Tomodachi Life. Les Miis peuvent ainsi tisser des relations entre eux, amicales mais aussi amoureuses. Chaque avatar possède sa propre personnalité qui aura été définie pendant sa création et qui déterminera sa compatibilité, ou non, avec les autres personnages. Mais là encore, l’influence du joueur est assez rudimentaire, car il faut juste de temps à autre répondre à des questions en guidant le Mii dans ses choix. Au mieux on pourra éventuellement choisir qu’un couple puisse se marier ou non, voire d’avoir une progéniture. Pour le reste, on sera encore une fois juste spectateur durant les rendez-vous amoureux ou quand un Mii déclare sa flamme à un autre. Ce qui peut éventuellement rater, avec pour conséquence une crise de déprime qu’il faudra soigner, en le faisant participer à des activités un peu plus joyeuse. On peut donc s’amuser à interférer dans les relations, en désignant les lieux des rencontres ou si un Mii devrait être ami avec un autre. Mais comme le reste, ce sont des choix sommaires qu’on aura vite fait de sonder, pour finalement en voir les limites assez rapidement.
En scrutant Tomodachi Life en détails, on peut allègrement apercevoir ses nombreux défauts, qui ne se caractérisent pas réellement par un manque de contenu, puisque le jeu regorge d’objets à collectionner. Mais par un manque d’interactivité assez flagrant et qui nous cantonne vite à tout le temps faire la même chose. Et c’est peut-être ingénieusement là que le jeu arrive à s’en sortir, à jouer avec la persévérance des joueurs pour les obliger à découvrir toutes les nouvelles subtilités qui se cachent dans le jeu. Le principe étant bien entendu d’y jouer par courtes sessions de quelques minutes, afin de ne pas s’enliser trop vite dans la monotonie. On se laisse divaguer le temps d’une partie dans ce petit monde, sans vrai but, simplement pour prendre plaisir à voir nos Miis évoluer. Un concept qui risque de ne pas plaire à tout le monde, mais qui peut étonnement être addictif et amusant sur le court terme. Encore faut-il pouvoir se laisser aller vers cet univers complètement loufoque et qui n’obéit à aucune logique.
En conclusion
Dans le petit monde du jeu vidéo, on aime bien mettre des étiquettes, afin d’identifier à quelles catégories appartient un jeu. Et de manière un peu ironique, Tomodachi Life est précisément le genre de production qu’on aura bien du mal à classer dans un tiroir. Car si l’on s’attarde uniquement sur les quelques mini-jeux qui nous sont offerts, on pourrait le qualifier comme étant une party-game du pauvre, car le jeu n’en possède finalement pas énormément. En restant dans le cadre d’un simulateur de vie, là encore le cadre est bien trop léger et les interactions trop limitées pour y voir un intérêt sur le long terme. Ce qui fait l’attrait de Tomodachi Life, comme dans un Animal Crossing, c’est finalement qu’il n’y a pas de véritable objectif à atteindre. Il s’agit d’un jeu qu’on butine au fil de notre envie et on s’y amuse le temps de quelques minutes. Au point qu’on a même envie d’y revenir, même si l’on ne sait pas vraiment pourquoi.